Ravel par les Ballets de Monte-Carlo

by Carlo Schreiber

Photo  © Hans Gerrritsen

Les Ballets de Monte-Carlo proposent chaque année un spectacle féérique.

La nouvelle création de Jean-Christophe Maillot réunit 240 artistes sur scène pour donner corps à un spectacle grandiose. Cinquante danseurs, quatre-vingt-dix musiciens et cent choristes partagent la scène du Grimaldi Forum. Cecilia Bartoli a créé spécialement pour cette occasion une académie de jeunes chanteurs.

Le spectacle s’intitule “L’Enfant et les Sortilèges”, d’après l’opéra de Maurice Ravel.

C’est un dernier hommage au centenaire de la naissance de S.A.S le Prince Rainier III.

Créé par Ravel en 1925 à Monte-Carlo sur un livret de Colette (dont on célèbre cette année les 150 ans), l’opéra “L’Enfant et les Sortilèges” était une des œuvres favorites du Prince Rainier III.

Le programme commence par” La Valse” également fort appréciée par le Prince.

“La Valse” est actuellement l’œuvre de musique classique la plus jouée dans le monde dans sa version d’orchestre. Initialement conçue comme un poème chorégraphique Ravel avait souhaité qu’elle soit dansée par les Ballets russes. Diaghilev avait refusé le projet en dépit de l’entremise de leur amie commune Misia Sert.

Ravel lui avait dédié sa composition en 1920. Ce n’est qu’en 1951 que George Balanchine la chorégraphia à New-York. C’est cette chorégraphie qui est entrée au répertoire des Ballets de Monte-Carlo en 1975.  Il s’agit d’un ballet néoclassique avec un décor minimaliste très joliment éclairé. “Les Valses Nobles et Sentimentales” constituent le premier tableau, suivi de la célèbre “Valse”.

Balanchine est inspiré par l’élégance de la Haute Société américaine.

Les danseuses portent des tutus de tulle violet et de longs gants blanc. Les danseurs sont en frac, un collant et un haut moulant à plastron, Le couple de solistes et le corps de ballet sont éblouissants et rappellent les danseurs fastueux et les plus glamour de Hollywood.

L’Orchestre Philarmonique de Monte-Carlo est un des meilleurs orchestres d’Europe.

Les musiciens passent avec la même aisance, de la musique symphonique, à la musique baroque, à l’opéra en passant par l’accompagnement orchestral des ballets. Le chef d’orchestre David Molard Soriano illustre à la perfection la véritable nature des “deux Valses” de Ravel.

L’orchestre se présente avec une transparence et une sonorité époustouflante. Rythme, émotion, compréhension de l’intention, phrasé minutieux, intelligence…tout cela crée une expérience inégalée dans cette splendide performance. Tout l’esprit de Ravel y est, indéniablement.

L’Opéra ” L’Enfant et les sortilèges” fut composé peu de temps après “La Valse”, et représenté pour la première fois à Monte-Carlo en 1925. Cet opéra est habituellement qualifié de “fantaisie lyrique”. Ravel l’avait déjà imaginé à l’époque, comme une comédie musicale avant l’heure. Le livret écrit par Colette et intimement lié à la musique. La chorégraphie de Jean-Christophe Maillot est une recréation revisitée d’une première version datant de 1992, qui était sa première chorégraphie à Monaco, avant qu’il ne devienne le directeur officiel des Ballets de Monte-Carlo. Comme ce premier spectacle était une réussite, il reprend les décors et costumes sublimes de Jérôme Kaplan.

Dans une maison de campagne, un enfant voit sa rêverie tourner à l’agressivité. Désobéissant et insolent, sa mère le punit. Saisi par une pulsion dévastatrice, il déchire ses cahiers, brise les objets familiers et brutalise les animaux. Ivre de rébellion, il s’abandonne au sommeil, les sortilèges visitent ses songes et le harcèlent à son tour. L’enfant a peur : ému et las, il pleure et prenant conscience des conséquences de sa révolte, il souhaite retrouver un havre de paix. L’enfant s’apitoie sur le sort des animaux qu’il a brutalisés. Seul et plein de regrets, il fait preuve de bonté et tourné vers sa mère, il lance un appel de détresse finale.

Les cent choristes dirigés par Stefano Visconti qui sont placés des deux côtés du balcon sont exceptionnels et surprenants. L’académie lyrique créée pour l’occasion par Cecilia Bartoli et le chœur d’enfants de l’Académie de Musique émeuvent le public.

Jean-Christophe Maillot s’est emparé de l’oeuvre pour en faire un ballet fastueux.

Les chanteurs-solistes sont placés sur le côté de la scène au lieu d’être face au public. Les voix ne portent pas et il est impossible de comprendre le texte. On aurait pu y remédier en projetant le texte en surtitres. Mais Maillot ne veut pas distraire le public.

Ce n’est plus un opéra, mais un ballet opulent qu’il nous offre.

On assiste donc à une magnifique succession de 21 tableaux mêlant jazz, foxtrot, ragtime, polka et valse.

Les duos de chats, le trio de batraciens, l’ensemble de tasses et théière, oiseaux et l’Arithmétique en personne sont dansés dans un registre qui dispute la fantaisie à la technique. Une allégresse et énergie éclatantes se transmettent du plateau à la salle et on ressort, des paillettes plein les yeux, avec la sensation d’être revenu à son âme émerveillée d’enfant le temps d’une soirée magique à Monaco.

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